Introduction

Votre film a été exposé, il est temps maintenant pour vous de le développer. C'est cette étape, toute aussi primordiale pour le rendu de la photographie finale que celle de la prise de vue, que nous allons détailler ici. Le développement consiste à faire passer votre film dans une succession de bains de compositions chimiques différentes dans le but final de révéler l'image latente du film et de rendre ce dernier insensible à la lumière. Une fois cette étape réalisée, le film dont les images seront stabilisées sera à même d'être exploité de manière à réaliser des tirages suivant différentes voies possibles.

Développer soi même un film en noir et blanc n'est pas une opération difficile pour peu que l'on se documente, que l'on fasse preuve d'un peu de méthode et de patience. Cela nécessite au préalable un léger investissement en produits de chimie et en matériel de laboratoire. Notez aussi qu'il n'est pas nécessaire d'avoir une quelconque base de connaissances en chimie pour ce faire, ce tutoriel vous apportera les connaissances requises pour mener à bien vos premiers développements.

Vu d'un négatif noir et blanc développé Négatif noir et blanc développé : Avec un peu d'attention et de méthode, le développement d'un film devient rapidement une opération routinière.

Ici, on ne traite que du développement d'un film négatif noir et blanc. Le développement d'un film couleur se fait d'une toute autre manière qui ne fait pas l'objet de ce tutoriel. Les films spéciaux noirs et blancs dits "chromogènes" (dont l'utilisation est relativement peu courante) font comme les films couleurs exception à ce document.

Pourquoi développer soi même ses films ?

Si l'argentique a fortement décliné depuis l'avènement du numérique, il est aujourd'hui encore facile de trouver un laboratoire professionnel pour le développement de films, que ceux ci soient en noir et blanc ou en couleur, négatif ou diapositif. Il est alors légitime de se poser la question de l'intérêt d'apprendre les principes et techniques du développement. En dehors de la simple curiosité personnelle, développer soi même ses négatifs présentent pourtant plusieurs intérêts.

Tout d'abord, la maitrise complète du processus : Si un débutant développe souvent ses films selon le même procédé, l'amateur éclairé personnalise au mieux ses développements en fonctions des prises de vues présentes et du rendu désiré. N'oubliez pas que le développement est comme la prise de vue, un processus créatif. Ainsi le choix du révélateur, sa dilution, une augmentation ou une diminution du temps de développement de référence, ou plus rare, le choix de la température des bains influent sur le rendu final du film développé. Notons cependant que certains laboratoires professionnels proposent davantage de choix pour le processus de développement, notamment en proposant un choix (assez limité) de révélateurs. Ces services particuliers sont bien évidemment plus onéreux.

Économiquement, il est d'ailleurs plus intéressant de développer ses films soi même. Même s'il est difficile d'évaluer de manière précise le cout d'un développement, on peut estimer que celui-ci ne dépasse pas les 1€ par film 135, et 2€ par film 120 hors équipement. Cet équipement listé à la page suivante n'est pas onéreux et se trouve facilement.

Enfin un dernier avantage, et non des moindres réside dans la qualité du développement. Délivrer ses films à un professionnel du développement n'est pas un gage de sûreté. Mauvais développement, découpes ratés, rayures, négatifs instables, ou encore étiquettes collées sur le négatif, internet regorge de témoignages pas toujours élogieux concernant des sociétés prétendues sérieuses.

Le développement, étape par étape

Décrivons d'abord de façon sommaire la composition d'un film argentique : Celui-ci est constitué d'un support, le plus souvent de nature plastique sur lequel repose une gélatine qui est la partie active du film. Cette couche contient des cristaux de bromure d'argent (ou d'halogénure d'argent suivant les films), sous forme d'ions d'argent (Ag+) et d'ions de brome (Br-). Lors de l'exposition, la scène photographiée vient se projeter sur le film. Quelques ions d'argents illuminés, passent sous la forme d'atomes d'argent au cours d'un processus de réduction chimique. Ils ne font alors plus partie du cristal de BrAg, et vont avoir tendance à s'agglutiner entre eux. Ce phénomène va ainsi se réaliser suivant des proportions différentes sur la surface du film créant ainsi l'image latente. Notons cependant que la densité d'atomes d'argents présente sur la surface du film est trop peu importante pour dévoiler de manière exploitable l'image présente sur le film. Il convient donc d'utiliser un révélateur pour augmenter cette densité.

Le développement d'un film noir et blanc se fait en règle générale par son passage dans 5 bains successifs :

  1. Le prémouillage
  2. Le révélateur
  3. Le bain d'arrêt
  4. Le fixateur
  5. Le rinçage
Le prémouillage

Le prémouillage est souvent considéré comme une étape facultative par certains. Ce bain a trois fonctions notables : La première est d'éliminer la couche anti-halo du film si celui-ci en présente une. Cette couche est alors présente sur la partie dorsale du film c'est à dire, sur la face opposée à celle de l'émulsion. Lors de l'exposition, une partie de la lumière peut traverser le film, se refléter sur la plaque de maintient du film, pour revenir sur l'émulsion. Ces rayons lumineux parasites peuvent alors occasionner un flou. Les films présentant un support épais (tel les films 120) sont les plus sujets à ce phénomène. Pour palier à ce problème, ces films disposent d'une couche anti-halo qui absorbe la lumière résiduelle qui a traversée la gélatine et le support. La seconde fonction du prémouillage est de ramollir la gélatine. Ainsi, le film déjà humide rend plus facile l'action du révélateur dès que celui-ci est à son contact. Notons enfin que ce bain permet d'harmoniser les températures de la cuve et du film, avec la température du révélateur.

Le révélateur

L'action du révélateur est de réduire de proche en proche les ions Ag+ voisins des atomes d'argents déjà réduits par la lumière. L'effet du révélateur sera d'autant plus fort que sa concentration, sa température et le temps durant lequel il est en contact avec le film seront importants. Il convient donc de respecter scrupuleusement ces paramètres de manière à obtenir un négatif de sortie ayant une densité adéquate, dévoilant au mieux l'image telle que voulue par le photographe. D'une certaine manière, on peut considérer que le révélateur amplifie l'image latente de départ.

Le bain d'arrêt

Le bain d'arrêt, au pH acide, stoppe net l'action du révélateur. Les temps de révélation dépassant parfois d'une dizaine de secondes le temps préconisé ont un impact néfaste sur l'aspect final du négatif. Le bain d'arrêt permet donc un meilleur contrôle du temps de révélation. En outre, il permet d'éviter un épuisement prématuré du fixateur, prochain bain du processus de développement.

Le fixateur

Les ions de bromure d'argent qui n'ont pas été réduits sont dissous par le fixateur, stabilisant ainsi le film qui sera à la fin de cette étape insensible à la lumière. Notez donc que si cette étape est mal réalisée, il restera sur le film des ions d'argent qui pourront être réduit par la suite par l'action de la lumière sur le négatif développé, voilant irrémédiablement ce dernier !

Le rinçage

Le rinçage permet enfin d'éliminer toute trace de produits chimiques du film, afin d'éviter que des réactions parasites se manifestent entre la chimie résiduelle et le film qui pourraient alors dégrader ce dernier. À la fin du rinçage, on a donc un film dont les régions ayant reçues de la lumière lors de l'exposition présentent une forte densité d'atomes d'argents. Ces zones du négatif laissent faiblement passer la lumière, elles apparaissent sombres, d'où le nom de "négatif" donné à ce type de film une fois développé.

Plan du tutoriel :

Voici le plan du tutoriel. Je vous conseille vivement d'en faire la lecture dans l'ordre et ce avant toute entreprise de développement de votre premier film. Même après sa lecture, il est plus que probable (pour ne pas dire certain) que vous ayez encore des interrogations sur le sujet. Les forums dédiés à la photographie, et tout particulièrement ceux spécialisés dans la photographie argentique sauront répondre à vos questions. N'hésitez donc pas à les fréquenter et à partager vous aussi vos expériences pour mieux vous perfectionner !

  1. Introduction
  2. Le matériel de laboratoire utile au développement
  3. La chimie nécessaire
  4. Les étapes du développement
  5. Le négatif développé
  6. Annexes : Liens et documents complémentaires utiles

Les données et méthodes présentées dans ce tutoriel sont comme tout ce qui touche à la photographie sujettes à discussions. Chaque photographe, amateur ou aguerri a ses méthodes et ses habitudes. J'ai ici rédigé les miennes que j'ai acquis en me documentant suivant différentes sources et suivant ma propre expérience en laboratoire. Dans tous les cas, je ne saurais être tenu responsable des erreurs qui pourraient être commises lors du développement de vos films si quelques unes des informations présentes ici venaient à être mal interprétée. Ces pages sont donc données à titre d'information, le lecteur restant encouragé à multiplier ses sources d'information. Cette déclaration peut sembler quelque peu "lâche", j'en conviens. N'oubliez pas cependant que l'on est tous confronté un jour que l'on soit expérimenté ou non en la matière, à des erreurs lors du traitement de nos films. En déclinant ici toute responsabilité, j'espère vous motiver à multiplier les sources d'information et à vous orienter vers les forums pour obtenir des donnés complémentaires qui auraient été omises dans ce tutoriel.